prog: 2734
squelettes/rubrique-3.html

Rabah Ameur-Zaïmèche

Arrivé en France à l’âge de deux ans, l’Algérien Rabah Ameur-Zaïmeche a étudié les sciences humaines parce qu’il n’osait pas avouer à ses parents qu’il rêvait de faire du cinéma. Amateur de westerns et de films noirs, il a réalisé son premier film à 35 ans, inspiré des cités de banlieues dans lesquelles il a grandi. D’emblée, il cumule les rôles de scénariste, acteur et réalisateur, puis devient son propre producteur, ce qui lui permet de fabriquer ses films en toute indépendance et dans une forme d’artisanat assumé. Restant ouvert aux imprévus et aux improvisations, jamais très loin d’une matière documentaire, son cinéma s’avère passionnant. Poétique et politique, lyrique et pudique, loin des standards du film militant, il oscille du naturalisme au polar le plus noir en passant par le film d’époque en costume. Entre douceur et noirceur, son cinéma s’inscrit dans la conflictualité des rapports sociaux, toujours du côté de la marge, des classes indésirables en prise avec l’accablante réalité des dominants. En quête d’utopies collectives, de dissidences ou d’insurrections, il suit la trajectoire de ceux qui cherchent à bifurquer, à changer le cours de leur destin, hors des structures et des modèles de réussite proposés par notre société… À l’occasion de la sortie de son dernier film, "Le Gang des Bois du Temple", nous sommes ravis de recevoir Rabah Ameur-Zaïmeche pour trois soirées. Ces deux mois de rentrée seront l’occasion d’un focus au cours duquel nous pourrons (re)découvrir plusieurs de ses longs métrages, en parallèle à une rétrospective intégrale qui se déroule du 12 septembre au 17 octobre à la Cinematek de Bruxelles.


Les projections seront suivies d’une rencontre avec le réalisateur le 27, 28 et 29 septembre



Rabah Ameur-Zaïmèche, 2022, DCP, vo st ang, 113

Après des films réalistes, voire naturalistes, en costume ou noirs très noirs, Rabah Ameur-Zaïmèche se lance dans un polar aux confins des cités HLM. À partir d’un fait divers réel, le braquage d’un prince saoudien sur la bretelle d’une autoroute en 2014, il élève la banalité du quotidien de quelques gars de banlieue qui galèrent entre potes vers le panache d’une conspiration majestueuse. Là, entre hold up, gang armé, mafieux puissants et vengeance, il documente les bars PMU ou les familles en galère. Tendu dans sa fiction autant qu’évadé des codes qu’elle lui impose, "Le Gang des Bois du Temple" s’achemine librement dans son genre, vibrant d’un lyrisme sec, troué d’instants suspendus à la beauté d’une voix ou la tendresse d’un geste. Ameur-Zaïmèche n’enferme jamais ce qu’il filme dans son genre mais multiplie les figures sans les assigner. Tout se tient au bord des possibles. Y compris le film lui même. De cet indéterminé fuse le romanesque par où son cinéma s’invente autant que les personnages dans ses films. Alors même qu’ils semblent voués à l’échec, certains rêves arrivent à percer les murs de l’écrasante réalité. Pour le meilleur ou pour le pire, pourvu qu’on ait l’ivresse.

27.09 > 19:00   + 03.10 > 22:00 + 05.10 > 19:00 + 12.10 > 20:00 + 13.10 > 18:00 + 20.10 > 21:00
7€ / 4€ / 10€


Rabah Ameur-Zaïmèche, 2001, FR, DCP, st ang, 83

Étudiant en sociologie puis en anthropologie, Ameur-Zaïmèche réalise son premier film en 2001, à Montfermeil, où il a grandit. Petit film, un peu jeté comme un coup de dés, tourné par-ci et en impro par-là, "Wesh Wesh" raconte la double peine de Kamel, français viré de France après avoir fait de la prison et de retour d’Algérie sans papiers. En quête d’un travail que son récent passé lui rend inaccessible, il zone dans une sorte d’entre-deux auquel cette double peine l’a condamné. Autour de lui, la vie suit son cours lent dans l’ennui, le vide, les revendications et les exclusions, des combines de son petit frère qui se rêve en dealer en chef à sa mère qui bataille sur tous les fronts. La cité ici est un territoire tout en lignes de fuites, dépliée autour des trajectoires de ceux qui l’habitent et la parcourent en tous sens et de toutes les manières. Nerveux et électrique par instants façon Spike Lee, parfois laconique comme sa BO jazzy, "Wesh Wesh" croque aussi quelques rapports dans des scènes cocasses à l’humour plutôt pince-sans-rire. Y irradie aussi la grâce d’un cinéaste qui filme à fleur de monde ce qui y palpite partout des indomptables élans de rages, de désirs et de fraternités.

28.09 > 19:00   + 12.10 > 22:00
7€ / 4€ / 10€


Rabah Ameur-Zaïmèche, 2006, FR-DZ, DCP, vo fr st ang, 100

Après avoir purgé une peine de prison en France, Kamel revient au bled. Entouré par sa famille, il est chaleureusement accueilli dans le village. Comme son titre le laisse supposer, la deuxième réalisation de Zaimeche pourrait tout autant être la suite du parcours du héros de "Wesh Wesh" qu’un préquel. Ce flou narratif et le caractère interchangeable des deux œuvres donne dès lors l’impression de former un diptyque sur une âme errant entre l’Algérie et la France, prise dans un cycle infernal où il est impossible de trouver sa place. L’auteur balaie ainsi d’un revers de la main le mythe du retour aux origines, la communauté kabyle étant tout autant traversée par des forces coercitives et la violence sociale que la banlieue parisienne. D’une lucidité implacable, Ameur-Zaïmeche n’en est pas moins un authentique cinéaste qui démontre, à travers des ruptures stylistiques audacieuses, une véritable foi dans les vertus de son art, seules à même d’offrir une échappatoire à ses personnages.

28.09 > 22:00   + 19.10 > 19:00
7€ / 4€ / 10€


Film

Dernier maquis

Adhen

Rabah Ameur-Zaïmèche, 2008, FR-DZ, DCP, vo fr st ang, 93

Entre comédie sociale et tragédie prolétarienne, "Dernier Maquis" décrit le sort réservé à ceux qui, après avoir franchi les mers et les déserts, s’abîment pour un salaire de misère. Nous sommes dans une zone industrielle à l’agonie, où Mao, patron musulman prosélyte converti au libéralisme le plus vil, possède une entreprise de réparation de palettes et un garage de poids lourds. Cette prison à ciel ouvert va servir de décor à un huis-clos entre les ouvriers et leur patron. Une sorte de théâtre antique où s’active chaque jour une main d’oeuvre sous-payée, divisée entre Maghrébins et Africains. En bon patron paternaliste, Mao décide d’offrir à ses ouvriers une minuscule mosquée au sein de l’entreprise, dont il désigne lui-même l’imam, alors que la tradition veut que celui-ci soit choisi par les fidèles. Les problèmes commencent... Comme si on avait touché à son dernier rempart, son dernier maquis, le personnel maghrébin proteste contre cette nomination. Les ouvriers d’Afrique noire, plus précarisés encore, refusent d’entrer dans la fronde. Au milieu de la mêlée, Mao tire les ficelles. Mais la revendication sociale va exploser un peu plus tard, lors des premiers licenciements...

13.09 > 20:00 + 29.09 > 18:00   + 19.10 > 21:00
7€ / 4€ / 10€


Rabah Ameur-Zaïmèche, 2012, FR, DCP, st ang, 97

France, 1755. Louis Mandrin, célèbre contrebandier, vient d’être exécuté. Afin de perpétuer sa mémoire, sa troupe parcourt le pays à la recherche d’un imprimeur prêt à reproduire ses écrits. La décision d’Ameur- Zaimeche de se pencher sur une figure historique de la résistance à la suite de "Dernier Maquis" n’est guère surprenante, Mandrin et ses partenaires n’incarnant au final que des maquisards d’un autre temps. En redonnant une légitimité politique à ces hommes et femmes trop souvent considérés comme des crapules par l’État, le film nous invite à demi-mot à nous inspirer de cet épisode historique pour penser de nouveaux champs d’action pour demain. Probablement désespéré par l’absence de véritables formes de résistance dans notre monde contemporain, Ameur-Zaïmeche nous plonge dans certains espaces quasi mystiques où la nature, sinon virginale, n’est du moins pas encore souillée par le capitalisme et où tous les êtres, qu’ils soient cheval, arbre ou homme, sont mis sur le même pied d’égalité.

15.09 > 21:00 + 29.09 > 21:00  
7€ / 4€ / 10€


squelettes/rubrique-3.html
lang: fr
id_rubrique: 2736
prog: 2734
pos: aval