Le 23 janvier, c’est jour d’anniversaire au Nova. Cette année, pas de chance : ça tombe un mardi. Et puis, 27 ans, ça ne fait pas un chiffre rond. Alors pas de fête… De toutes façons, le Nova a d’autres chats à fouetter en ce moment. Un bail qui se termine au mois de mai et un loyer qui, après être resté modeste pendant 20 ans, pourrait grimper tellement haut que le Nova ne serait plus le Nova. Sauf à faire en sorte que son joker, appelé Supernova Coop, le tire de cette mauvaise passe avant le 31 mars…
Alors, dans l’équipe du Nova, on cravache. Et on profite de ce programme de janvier-février pour décliner et faire résonner ce qui nous arrive actuellement.
C’est l’histoire des salles de cinéma, de leur apogée puis de leur déclin : à Bruxelles, elles étaient encore au nombre de 133 en 1960… Aujourd’hui, les doigts de deux mains suffisent à les compter. C’est l’histoire de l’une d’entre elle : le Studio Arenberg, arrivé à la fin de son bail en 1987 après 52 ans de bons et loyaux services, qui fut chassé par une banque. La mobilisation fut forte, mais pas suffisamment pour faire plier celle-ci.
C’est l’histoire universelle des grandes villes qui, entrées en concurrence effrénée entre elles, ne pensent qu’à prospérer grâce aux investissements financiers privés, aux grandes infrastructures, au "branding" ou au tourisme de masse. C’est l’histoire particulière d’un groupe qui arriva naïvement 10 ans plus tard dans une rue qui était alors au creux de la vague ; et put occuper de manière précaire cette même salle, restée à l’abandon pendant tout ce temps.
C’est l’histoire d’un quartier où les prix du marché ont explosé. La trajectoire improbable d’un cinéma autogéré par une équipe bénévole, qui avec enthousiasme et détermination a su résister au temps, aux changements de propriétaires, à la précarité, comme à la marche forcée du tout numérique. À tel point que, 27 ans plus tard, ce nouvel environnement rendrait presque anachronique un tel cinéma... s’il n’avait pas creusé son propre sillon, tissé des liens, développé une programmation singulière qui explore, découvre, propose, rassemble.
À l’heure où sonne la fin de bail, c’est ce lieu unique et ces valeurs non marchandes qu’il s’agit de défendre et de cultiver. Car cette fois, pas question d’envisager la dernière séance. Une coopérative a été créée, qui devrait permettre au Nova de garder l’usage de sa salle… jusqu’en 2092.
Voilà l’histoire qui va se ramifier tout au long de ces sept semaines, sur l’écran et dans la salle de la rue d’Arenberg. Cette histoire, qui n’est pas que la nôtre, va se déployer à travers films, rencontres, expos, concerts, événements spéciaux, sans oublier les soupes et autres mets qui nous tiendront au chaud pendant ces longues soirées d’hiver. Jusqu’au lancement du décompte final, fin février, à un mois de la date fatidique du 31 mars. D’ici là, on se mobilise… et on se donne rendez-vous en avril pour fêter ça ?