Italie, juillet 2001. Dans la ville portuaire de Gênes, un Forum Social est organisé en parallèle au sommet G8 où se réunissent les chefs d’États “des sept pays démocratiques les plus industrialisés, plus la Russie”. Trois journées de manifestations et de rencontres rassemblent 300.000 personnes. Elles sont réprimées dans un déferlement inouï de brutalité par tout ce que l’Italie compte d’uniformes bleus, verts ou kakis. Manifestants gazés, traqués, matraqués, blessés. L’un d’entre eux est tué par un carabinier. D’autres sont enfermés arbitrairement dans une caserne, menacés et torturés, parfois pendant leur sommeil. En point d’orgue, un raid punitif a lieu dans l’école qui abrite avocats et médias alternatifs. Le mouvement altermondialiste, alors en plein essor, ne s’en remettra pas. Le G8 ne se réunira plus jamais dans une grande ville. Qualifié par Amnesty International de “plus grave atteinte aux droits démocratiques dans un pays occidental depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale”, l’épisode sera vite éclipsé par les attentats du 11 Septembre.
Mais 22 ans plus tard, “Gênes” laisse encore des traces. Notamment en Italie, où les enquêtes et procès qui l’ont suivi ont abouti à la relaxe de la plupart des responsables des exactions policières, bénéficiant de prescriptions, d’amnisties ou de classements sans suite. Les militants altermondialistes, eux, ont eu moins de chance. En 2012, dix d’entre eux ont été condamnés à de lourdes peines de prison sur base d’une loi mussolinienne permettant d’incriminer toute personne présente à une manifestation au cours de laquelle des dégradations matérielles ont eu lieu… même si cette personne n’en a commis aucune. L’un de ces militants s’appelle Vincenzo Vecchi. Il a fui l’Italie en 2012 et s’est réfugié en France, où il a reconstruit sa vie. Mais depuis 2016, de procès en procès, il vit sous la menace d’une extradition vers l’Italie où il risque 12 ans de prison. “L’affaire Vincenzo Vecchi” est l’occasion de rouvrir cette page de l’histoire contemporaine. Pour mieux en finir avec les effets plombants de “Gênes”.