Scénariste et réalisateur, Jeff Lieberman (né à New York en 1947) est l’un des cinéastes de genre américains les plus singuliers et inventifs des années 70 et 80. On pourrait qualifier de bizarres, voire de complètement barrés ses trois films les plus connus : "Squirm" (1976), "Blue Sunshine" (1978) et "Just Before Dawn" (1981) : des classiques qui sont aujourd’hui nimbés d’une aura culte. Destinés à la base au marché des cinémas grindhouse et des drive-in, les films de Lieberman utilisent l’horreur pulp pour véhiculer une critique acérée de la politique américaine d’après 1968. Des esprits pervers dans l’arrière-pays des États-Unis dans "Squirm" à l’impact de la consommation de drogue sur les forces plus conservatrices de la société dans "Blue Sunshine", en passant par la guerre des sexes de "Just Before Dawn", Lieberman appuie là où ça fait mal avec ses analyses percutantes de la psyché américaine esquintée des années 70. Enfin, avec "Remote Control", il ajoute une bonne dose de paranoïa à l’hyperindividualisme des années 80. Marquant des réalisateurs comme Eli Roth et Quentin Tarantino, les films à petit budget décalés de Lieberman font preuve d’une ingéniosité semblable aux productions de Roger Corman. Ils contiennent une vision unique du genre, des scénarios novateurs et non consensuels, un panache visuel, un sens de l’humour original et une vision cynique du monde. « Tout se résume à une bonne histoire », dit Lieberman dans des interviews. Il faut dire que ses films sont effectivement construits autour d’une intrigue bien ficelée qui ne considère pas le surnaturel comme source de l’horreur, mais plutôt la nature fondamentalement dépravée de l’humanité, qui corrompt la nature et la société.