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Armand Gatti

"L’infini est une région. Il faut s’y diriger."

Résumer la vie de Dante Sauveur Gatti, dit Armand Gatti (1924-2017), est un exercice qui demanderait plus que les 16 pages d’un programme du Nova : résistant, évadé et maquisard pendant la Seconde Guerre Mondiale, voyageur et reporter (Prix Albert-Londres 1954), dramaturge, poète et metteur-en-scène inclassable, scénariste et réalisateur libertaire, mais aussi expérimentateur du théâtre de rue, de l’expression collective et de la création populaire... Son œuvre est imprégnée de ce parcours riche en rebondissements et en rencontres (de Gilles Deleuze à Kateb Yacine, de Che Guevara à Mao Tsé-Toung, d’Henri Michaux à Jean Vilar, de Pierre Boulez à John Cage, de Chris Marker aux jeunes frères Dardenne qui furent ses assistants...), traversant et traversé par l’histoire, de l’Algérie à la Chine, de l’Amérique du Sud à l’Irlande du Nord, à la croisée des arts, des luttes sociales et révolutionnaires.

Alors que son film cubain "El Otro Cristóbal" (1963) sort en France en copie restaurée grâce à ED Distribution, et sera par la même occasion sur l’écran du Nova pendant plusieurs semaines, nous vous proposons quelques autres de ses films lors d’un week-end exceptionnel en compagnie de son fils Stéphane (lui aussi cinéaste) et de Jean-Jacques Hocquard, compagnon de route et administrateur de La Parole Errante, coopérative de création et lieu de convergences créé par Gatti à Montreuil en 1986, là où Georges Méliès installa autrefois ses studios.



Claude-Jean Bonnardot, 1959, FR-KP, 35mm, ko st fr, 84

Après avoir effectué des voyages en Chine et en Sibérie (en compagnie de Chris Marker), Gatti, récemment devenu rédacteur en chef de "Libération", part en Corée du Nord avec une délégation française, la première d’Europe occidentale à être invitée dans le pays après la guerre de Corée, On y retrouve, entre autres, le chansonnier Francis Lemarque, les cinéastes Chris Marker, Claude Lanzmann et Claude-Jean Bonnardot. C’est avec ce dernier que Gatti se lance dans ce film, dont il écrit le scénario, en s’inspirant de l’observation des blessures de la guerre et du traumatisme de la partition d’une nation. Entièrement tourné sur place, avec des artistes et techniciens locaux, le film, hors de tout exotisme mais avec un parti-pris pacifiste, met en scène l’histoire de deux amoureux séparés par la guerre. Jamais projeté en Corée du Nord jusqu’en 2010, le film fut aussi censuré en France jusqu’en 1963 pour "atteinte à la politique étrangère" du pays.

Trailer

27.09 > 20:00 + 20.10 > 18:00
6€ / 4€


Film + rencontre

L’enclos

Armand Gatti, 1960, FR, 35mm > video, st fr, 105

Printemps 1944. Au camp de concentration de Ianenberg, le commandant SS a l’idée de jeter dans un enclos deux détenus condamnés à mort : un Allemand, militant anti-nazi de la première heure, et un juif Français, jusque-là épargné pour avoir su réparer le coucou du commandant. Ils passeront la nuit ensemble, mais à l’aube, celui qui aura eu l’atroce courage de tuer son compagnon sera gracié. Jean Cocteau verra dans ce premier film d’Armand Gatti (tourné en Yougoslavie et accompagné de la voix off de Jean Vilar) : "la transcendance mystérieuse d’un documentaire tourné au cœur même de la haine par quelque diable boiteux. Car on s’étonne qu’un appareil puisse enregistrer les preuves d’un crime sans que les criminels s’en aperçoivent et ne le détruisent. ’L’enclos’ témoigne au même titre que ’Nuit et Brouillard’, le film d’Alain Resnais. Il témoigne avec une puissance irrésistible. Ils nous empoigne par la peau du cou. Il nous jette face à face avec cette tête de Méduse par laquelle notre courage doit se laisser pétrifier et convaincre."

+ L’Or du Rhin

Boris Lehman, 1997, BE, 16mm > video, 10

Dans l’extrait de ce film de Boris Lehman resté inachevé, Armand Gatti raconte son "aventure" à travers le Rhin, lorsqu’il état aviateur dans l’armée de l’air en 1940.

Séance introduite et suivie d’une discussion avec Stéphane Gatti et Jean-Jacques Hocquard.

Trailer (L’enclos)

12.10 > 18:00
6€ / 4€


Cette série de films réalisée en 1975 par le trio composé d’Armand Gatti, de son fils Stéphane Gatti et d’Hélène Châtelain, expose le spectateur à l’immigration ouvrière de ces années-là. Toujours animé de la volonté de briser les barrières et les codes quand c’est nécessaire, la bande à Gatti ne se contente pas de filmer les flux tendus de mécaniques infatigables et d’humains interchangeables. C’est en compagnie de chacune des communautés d’immigrés de l’usine Peugeot de Montbéliard qu’elle va concevoir les scénarios de chacune des parties de cette fresque ouvrière pour devenir une véritable (re)création collective. Une dynamique de réappropriation qui rappelle les groupes Medvedkine menés entre autre par Chris Marker (encore lui) avec deux spécificités pourtant : le trio demeure à la réalisation, ce sont les scenarii qui sont tous issus de co-écritures et quand les groupes Medvedkine s’inscrivent dans des temporalités bouleversées, "Le Lion, sa cage & ses ailes" documente le quotidien. Des huit films, deux ont été sélectionnés.

+ Arakha [Film marocain]

Armand Gatti, 1975, FR, video, 59

Troisième film de la série, "Arakha – film marocain", démarre par la lutte quotidienne des immigrés marocains pour articuler leurs pratiques religieuses avec la vie industrielle. Le ronronnement du récit se suit avec intérêt mais c’est un coup de théâtre qui donnera le coup de fouet vital au film : deux chômeurs bardés de temps libre s’emparent du scénario pour faire basculer le sujet vers d’autres préoccupations…

+ La bataille des 3 P [Film yougoslave]

Armand Gatti, 1975, FR, video, 43

« Faire du bruit, c’est prouver qu’on existe encore ». Pour exister face à Peugeot, son Pouvoir et sa Productivité, Radovan lance "La bataille des trois P – film yougoslave". Liberté de ton et hyperactivité rythment cet épisode centré autour d’un homme fraîchement licencié. Dans les interstices, il raconte la Yougoslavie, ses identités, ses minorités et ses spécificités d’expatriés. Refus de jouer l’indic et luddisme – prises de karaté sur voitures produites en série - ont eu raison de sa carrière chez Peugeot.

Séance introduite et suivie d’une discussion avec Stéphane Gatti et Jean-Jacques Hocquard.

12.10 > 21:00
6€ / 4€


En 1978, Gatti s’installe avec la Tribu (nom qu’il donne aux personnes qui travaillent avec lui) dans la ville nouvelle de L’Isle-d’Abeau pour y mener un projet d’écriture collective. Comme point de départ, il écrit un poème sur Roger Rouxel, jeune métallo de Vitry entré en résistance et membre du groupe Manouchian, arrêté, torturé et fusillé au Mont Valérien avec 22 de ses compagnons. L’idée de Gatti est de "donner quelques instants de plus à vivre, à travers votre imaginaire" à Roger Rouxel, au long d’un opéra de sept films qui retrace son amour condamné avec Mathilde, tout en rendant compte de la manière dont des habitants de la région s’emparent du personnage et de son histoire en fonction de leur propre vie. En voici deux extraits, les quatrième et septième épisodes.

+ Les loulous

Hélène Châtelain, Stéphane Gatti & Claude Mouiéras, 1979, FR, video, 58

"Les loulous" est le nom donné à de jeunes apprentis carrossiers ou tourneurs, ayant le même âge que Roger Rouxel au moment de son exécution. Maniant de grands pantins qui les représentent dix ans plus tard, ils imaginent ainsi quels auraient pu être les rêves de Rouxel. A ces images, se mélangent des archives, des actualités sur l’arrestation des Brigades rouges, la bande à Baader et leurs obsèques…

+ La dernière nuit

Hélène Châtelain, Stéphane Gatti & Claude Mouiéras, 1979, FR, video, 50

Plusieurs interviews de personnes ayant côtoyé Roger Rouxel se mêlent à un poème d’Armand Gatti. Les moines trappistes de l’Abbaye de Tamié retracent, à travers des chansons qu’ils ont composées, la dernière nuit du jeune résistant passée à la prison de Fresnes. C’est là que Rouxel écrivit sa première lettre d’amour à Mathilde. Qui fut aussi sa dernière.

13.10 > 17:30
6€ / 4€


Armand Gatti, 1983, FR, 16mm > video, st fr, 110

En 1981, Gatti s’installe à Derry, en Irlande du Nord , pour y préparer un film avec des habitants de cette ville dévastée par la lutte anglo-irlandaise et les confrontations entre catholiques et protestants. Edward Hobson, 20 ans, chômeur du lancashire, engagé dans l’armée britannique, s’écroule tué par une balle anonyme. Derry ou Londonderry ? Autrefois les lettres de l’alphabet gaélique correspondaient à des noms d’arbres. Derry signifiait : "forêt des petits chênes", puis ils ont changé Derry en Londonderry. C’est au carrefour des noms d’arbres et de ce non sens qu’est tombé le jeune soldat. C’est à ce même carrefour que passent et repassent des enfants de ces ghettos et d’une histoire qu’ils se tatouent sur les bras ou qu’ils gravent sur les murs... La police anglaise mène l’enquête, observe aux moyens de caméras les quartiers "sensibles" de la ville et étudie les fiches signalétiques des suspects potentiels, principalement celles des jeunes du Workshop, école alternative pour l’apprentissage de métiers manuels, qui a pour spécificité d’accueillir indifféremment protestants et catholiques, mais qui est pour la police anglaise un lieu de sédition.

Séance du 13.10 introduite et suivie d’une discussion avec Stéphane Gatti et Jean-Jacques Hocquard.

Trailer

13.10 > 20:30 + 18.10 > 22:00  
6€ / 4€


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