"Marianne Hertz : mannequin et mère idéale". Tel est le titre qu’un magazine néerlandais avait choisi, dans les années 1950, pour évoquer celle qui deviendra la grand-mère du cinéaste Tom Fassaert. Le père, l’oncle et la tante de ce dernier rient jaune lorsqu’ils évoquent cet article. Ils lui ont toujours transmis une image négative de Marianne. Il faut dire que leur enfance a été loin d’être idéale : les deux fils ont été très tôt abandonnés dans un orphelinat et leur relation avec cette femme fatale, difficile à cerner, a toujours été problématique. "Je suis le fils d’une mère portant un masque", dit le père de Tom, qui vient de couper les ponts avec elle. À l’aube de ses 30 ans, le cinéaste reçoit une mystérieuse lettre de sa grand-mère : elle l’invite à lui rendre visite en Afrique du Sud — là où, il y a des années, sa famille l’avait rejointe pour commencer une nouvelle vie… Il saisit l’occasion d’aller à sa rencontre et la filme dans l’espoir de trouver les pièces manquantes à ce puzzle familial : pourquoi y a-t-il des deux côtés autant de déception et de reproches, et pourquoi le sujet est-il si tabou ?
Ce faisant, Tom Fassaert reprend le flambeau d’une tradition familiale : son arrière grand-père comme son père ont toujours filmé, et ce dernier souvent sous forme de messages vidéo adressés à cette mère absente. Mais Marianne ne va pas se laisser faire, et elle va échapper de manière inattendue aux rôles de mère et de grand-mère auxquels tous les membres de cette famille tentent de la restreindre. Pour ce second long métrage (après "De engel van Doel", que nous avions programmé en 2011) qui a raflé de nombreuses distinctions sur son passage, le cinéaste mène une enquête palpitante où il se confronte de manière imprévisible à un personnage à la fois charismatique, distant et manipulateur : sa propre grand-mère, anti-héroïne inoubliable à l’écran.