C’était une autre époque, on croyait encore à un accord proche entre Palestiniens et Israéliens, Clinton présidait les USA entre deux Bush, le franc belge avait encore cours, Franquin et Marco Ferreri décédaient, tandis que Jean Paul II semblait immortel…
À Bruxelles, naissait un turbulant bébé dont la gestation avait duré à peine deux mois. Ses géniteurs, bilingues (ce qui était inhabituel dans cette région), avaient choisi de l’appeler Nova, un diminutif des supernovae, ces rares explosions cataclysmiques d’étoiles qui, pendant un court laps de temps, peuvent briller plus vivement qu’une galaxie toute entière. Il faut dire que le petit, surnommé "cinéma d’urgence", était promis à un avenir bref. Son enveloppe terrestre appartenait à une banque qui lui donnait à peine deux ans à vivre. Quant aux pouvoirs publics, sollicités comme parrains, certains d’entre eux misaient sur une mort prématurée au terme de quelques mois.
Et puis le temps passa, le chaos s’organisa, les propriétaires changèrent, les pouvoirs publics donnèrent leur soutien, le Nova resta. Il fêta ses anniversaires : 5 ans, 10 ans, 15 ans… et maintenant 20 ! Que de films, de découvertes, d’avant premières, d’Open Screens, d’invités, de débats, de performances, de concerts et de Live Soundtracks, d’expositions, de bières spéciales, ou encore de milliers d’heures passées en réunions… Et, tout comme l’onde de choc d’une supernova permet la formation de nouvelles étoiles, le Cinéma Nova a essaimé, donné des idées, permis des rencontres, noué des réseaux, fait des émules…
Ce qui est aussi remarquable dans cet anniversaire, au-delà du fétichisme d’un chiffre rond, de la longévité d’une telle programmation et de la confirmation qu’il existe bien un public s’engageant avec plaisir hors des sentiers battus, c’est qu’il célèbre aussi deux décennies d’autogestion collective tenant en grande partie debout grâce au bénévolat.
C’est tout cela que nous avons envie de fêter, par des rendez-vous réguliers tout au long des programmes de cette année 2017. Et puis par le projet d’écrire l’essentiel de cette histoire et d’éditer des archives de ces 20 années. Mais ça, c’est pour plus tard.
En attendant, la première surprise de cette nouvelle année est une bière spécialement brassée pour l’anniversaire du Nova. La seconde surprise n’est sans doute pas la plus joyeuse : le Nova augmente ses tarifs… pour la première fois en 20 ans. Mais sans changer son statut de cinéma le moins cher de Bruxelles, car c’est une augmentation toute douce et qui continue à tenir compte des différences de revenus des uns et des autres. Ce n’est pas par plaisir que ce changement s’effectue, mais c’est une nécessité dans cette époque d’austérité à tous crins et de réduction de subsides, qui devrait permettre au Nova d’avoir des reins un petit peu plus solides pour la poursuite de ses aventures.