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And... Cut !

Censure et cinéma

La censure du cinéma est un sujet bien vaste...
On pense immédiatement à des scènes coupées, à des films interdits, à des cinéastes emprisonnés. Viennent à l’esprit le sexe, la violence, des sujets tabous, contestataires. Moins, peut-être, les coupes bassement économiques (un film court se vend mieux, un film simple touche plus de public). On songe aux commissions de censure, petits lieux d’autoritarisme même en démocratie, alors que bien souvent ce sont des citoyens ou lobbies conservateurs qui font pression pour plus d’interdictions (éventuellement en troublant eux-mêmes l’ordre public qu’ils prétendent défendre). On ne se dit pas que les institutions, au moins, ça laisse des traces, alors que ce qui se décide là où se contrôlent les moyens de diffusions, de plus en plus privatisés et concentrés, ne se voit pas, ne pourra pas être évalué avec le recul dans 10 ans. On pense à la matière qui, même coupée, pourra être retrouvée. On peut plus difficilement imaginer celle qui n’a jamais pu exister. On se réjouit des films restaurés et des versions uncut sur DVD. On remarque moins le révisionnisme dans les ressorties en version manipulée conforme à la morale d’aujourd’hui, ou les oublis des films racistes, par exemple, dans les anthologies. On ne sait pas que des ayants droits bloquent eux-mêmes la diffusion de certains de "leurs" films, qui ne correspondent plus à ce qu’ils veulent vendre ou parce qu’ils préfèrent les faire oublier. Et puis on se dit qu’aujourd’hui, chez nous, la page est tournée, on peut tout dire, tout voir. On s’amuse à imaginer que certains films qui passent à la TV ont été interdits il y a 40 ans. On pense moins aux films qui ont été tournés il y a 40 ans et qui ne pourraient plus être faits aujourd’hui, parce que la morale évolue, le politiquement correct écrase, les logiques économiques laissent moins de marges de manœuvre. La censure est plus diffuse et ne porte bien souvent plus ce nom.

... dont nous ne ferons pas du tout le tour dans ce programme !
La censure est protéiforme et forcément ancrée dans un contexte, un endroit, une époque. Pour l’aborder, nous avons choisi de concentrer cette programmation (qui sera suivie par d’autres sur le sujet) sur quelques "espaces-temps" de liberté (la Belgique et sa réputation de pays sans censure, le Hollywood pré-Code, la Scandinavie des années 60-70) qui permettent d’en envisager les limites, l’avant, l’après ou l’ailleurs. Et surtout de présenter des films qu’on aime, qui sont autant de cas particuliers, l’occasion d’évoquer autant d’aspects de la censure et d’approfondir le sujet avec des invités et des séances spéciales. La censure est un bon argument marketing, paraît-il...



Film + rencontre

Histoires d’A

Charles Belmont & Marielle Issartel, 1973, FR, 16mm > video, vo, 89

Tourné en avril et mai 1973 sur une initiative du Groupe d’Information Santé (GIS) par Charles Belmont et Marielle Issartel, "Histoires d’A" est un documentaire qui s’inscrit dans la lutte pour la libéralisation de l’avortement et de la contraception. Le film est un témoignage sur ces luttes et plus largement sur les luttes féministes de cette époque. C’est un des premiers films à montrer un avortement par aspiration d’après la méthode Karman, ce qui le fera tomber sous le coup de la loi de juillet 1920 en France, interdisant non seulement l’avortement mais aussi l’incitation à celui-ci. Interdit de diffusion, il sera néanmoins projeté clandestinement à travers la France grâce au relais de groupes de militants avant de se voir autoriser à la diffusion en novembre 1974. Durant cette double carrière, le film aura été vu par des dizaines de milliers de personnes. Il a donc été un formidable outil de sensibilisation et d’information.

La projection sera suivie par une rencontre avec Marielle Issartel qui évoquera les histoires d’"Histoires d’A".

Avec la collaboration de la Ligue des droits de l’Homme

01.12 > 20:00
5€ / 3,5€


Video Nasties

Moral Panic, Censorship and Videotape

Jake West, 2010, GB, video, vo, 72

La censure britannique est réputée comme l’une des plus sévère du monde occidental. Menaçant fréquemment d’interdiction totale, on lui doit des kilomètres de coupes et une bonne liste de films invisibles. Les anglais amateurs de sensations fortes ont donc de tout temps dû trouver des brèches pour satisfaire leur curiosité. La donne changera avec l’arrivée du magnétoscope. Le marché de la VHS, non régulé, explose et permet aux curieux d’y trouver leur compte. Mais le grand public, stupéfait, découvre par la même occasion l’existence de films qu’il aura vite fait de qualifier d’infâmes, indécents, voire de diaboliques. C’est la panique ! Les moralistes crient à l’obscénité et veulent protéger les petits enfants. La presse à scandales s’en mêle et le moindre fait divers est désormais imputé aux "video nasties". La British Board of Film Censors fait l’interface entre l’industrie, le gouvernement et le public depuis sa création en 1912. Elle se voit désormais confier la mission impossible de classifier toutes les vidéos du commerce ! Des raids de police sont organisés dans la confusion totale pour saisir tout ce qui a l’air subversif. Une liste de titres totalement interdits est établie, les VHS sont brûlées, les éditeurs ou revendeurs condamnés, parfois même à des peines de prison ! Ce documentaire revient sur cette période agitée, rend hommage aux "video nasties" et élargit surtout le propos pour rappeler qu’au fond, l’enjeu de la censure est bien la domination par une minorité puissante qui impose à tous son étroitesse d’esprit.

+ Cut It Out [A Day in the Life of a Censor]

Adrian Brunel, 1925, GB, 16mm, muet, st int en, 19

Ce petit film humoristique se moque allègrement de la censure en mettant en scène un tournage constamment interrompu par un censeur zélé brandissant à tout bout de champs sa bible : la liste des interdits.

30.11 > 21:00 + 13.12 > 20:00
5€ / 3,5€


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lang: fr
id_rubrique: 1906
prog: 1903
pos: aval