Bruxelles est une ville littéralement traversée : par le canal, rappelez-vous le PleinOPENair de l’année passée ; par des boulevards, notamment la grande percée haussmanienne qui coupe son cœur en deux ; par la Jonction ferroviaire, après un chantier titanesque de plusieurs décennies ; ainsi que par des centaines de milliers de navetteurs qui y transitent quotidiennement.
Ville d’eau par ses vallées, ses rivières et son canal, Bruxelles est aussi une ville de chemin de fer (une trentaine de gares en activité et 267 km de lignes ferrées !). Une richesse et une chance ? La réalité offerte conduit à un autre constat : la SNCB transforme désormais les gares en cathédrales dont les entrailles deviennent de véritables centres commerciaux et les abords de vastes zones de bureaux, autant de vitrines pour touristes et investisseurs. Ainsi, la SNCB n’hésite pas à investir des sommes phénoménales pour bâtir des gares hors de toute proportion, ni de spéculer (avec les moyens que lui confère son statut d’entreprise publique) sur des terrains voisins pour y développer des projets qui n’ont rien à voir avec le transport de voyageurs ou de marchandises. Elle semble davantage préoccupée par son nouveau métier de promoteur immobilier. Si bien qu’il est devenu dangereux d’habiter près d’une gare ! A Bruxelles, les (ex)habitants des quartiers Nord, Midi ou Léopold en savent quelque chose...
La construction de la Jonction Nord-Midi provoqua une véritable saignée dans les quartiers populaires du centre-ville, entraînant l’expulsion de 13.000 personnes afin de permettre une ligne ferroviaire partiellement souterraine, trois gares et des immeubles de bureaux en surface. Dès lors, aux deux extrémités de cette jonction fleurirent les fantasmes d’ "international" et, avec eux, les projets d’autoroutes, de grands pôles de bureaux... Et leurs corollaires : spéculation, expropriations, chancres… 11.000 expulsions au quartier Nord et 20 ans de plans d’expropriation au Midi. Pour quel projet public ? Des immeubles de bureaux droits et lisses, verticaux ou horizontaux, toujours vides en soirée… voire vides nuit et jour… avant de se remplir pour se vider à nouveau, par la grâce d’institutions publiques ou privées qui goûtent ainsi aux joies du déménagement, remplissant d’un côté des bureaux flambant neufs pour laisser de l’autre autant de surfaces vides ! Un phénomène qui a certes pour vertu de faire plaisir au secteur immobilier, mais aussi de rendre exponentiel le nombre de millions de mètres carrés de bureaux inoccupés dans la Région. Le tout se faisant au détriment de fonctions essentielles de la ville comme l’habitat, l’artisanat, le commerce de proximité, l’espace public…
Et tandis qu’aux quatre coins du pays de nombreuses petites gares doivent mettre la clé sous le paillasson, que les prix des tickets explosent, que de nombreux cheminots ploient sous les nouvelles pratiques du "management" et que les trains déraillent, la SNCB rêve de nouvelles gares cathédrales à bâtir, de milliers de m2 de bureaux à ériger et envisage de dépenser 5 milliards d’euros pour... élargir la Jonction.
Face à ce train d’enfer, le PleinOPENair vous invite à marquer une pause le temps de deux week-ends, avec le quartier Midi pour gare de départ et d’arrivée, et une escale au quartier Nord. Une manière de se mobiliser pour que la SNCB et les pouvoirs publics replacent le ferroviaire comme un mode de déplacement d’intérêt général, et les gares comme des lieux d’accueil des voyageurs s’intégrant à la ville et aux quartiers.