Jeune blanc converti à l’Islam à 15 ans, Michael Muhammad Knight écrit "The Taqwacores" en 2003, un roman sur des groupes punk islamiques. Il y raconte la vie d’une colocation de punks à Buffalo, aux Etats-Unis. Tous sont musulmans pratiquants, mais le week-end ils rangent leur tapis de prière et organisent des soirées punk-rock. La parution du livre permettra à de jeunes punks musulmans américains de s’y reconnaître et de mieux définir leur identité. "Taqwacore" donne alors naissance à un mouvement musical.
Quelques années plus tard, pour partager ensemble leur musique et leurs croyances, Michael Muhammad et ses amis punks organisent une tournée dans l’ouest américain. On assiste alors a des concerts punks où des jeunes filles voilées reprennent les refrains en cœur, et où tout le monde "pogotte". En brisant certains interdits, par la pratique même de leur musique (femme qui chante, instrument à cordes électrique), les jeunes punks réalisent un affront direct aux idées même du culte musulman. "I want to fuck you during ramadan" ! Une audace qui surprend, justifiée par un affranchissement du culte : donner leur propre interprétation de ce qu’est l’Islam.
Parfois encensés, parfois censurés, ces jeunes tentent d’éveiller leurs pairs de tous âges et de toutes provenances à la possibilité d’une autre dévotion. Représenter une minorité, d’une minorité, d’une minorité : être jeune, punk et musulman. Ils se montrent prêts à tout pour s’imposer en public, ce qui donne lieu à des moments jubilatoires tel que le concert impromptu des Kominas, lors d’un rassemblement annuel de musulmans américains à Chicago, ou encore un concert final sur le toit d’un hôtel à Lahore au Pakistan.
Honnête, leur témoignage constitue bel et bien le document d’une naissance, avec ce que cela implique de recherche et d’éventuelles révélations. Cela suffit en soi pour distinguer "Taqwacore" de la mêlée des documentaires à sujet rock’n’roll, si souvent consacrés à la mythification d’un passé pas très lointain. Et pour légitimer sa réflexion provocante sur les questions de pratique religieuse, qu’il imbrique tout naturellement dans un ensemble bien vivant.
Si le personnage même de Michael Muhammad Knight est parfois dérangeant - dans sa culpabilité de jeune blanc né d’un père raciste, touché par Malcom X et converti à l’Islam -, sa volonté de créer un mouvement frais et honnête permet de cimenter cette envie de liberté de culte et de recherche du bonheur, tout en étant punk !