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Science in Society

L’introduction de nouveaux savoirs, de nouvelles technologies dans une société est loin d’être une évolution « naturelle », logique, prédestinée. Dans une société rêvant religieusement de modernité, « La Science », « La Technologie » et « Le Progrès » sont censés apporter des réponses absolues à nos questions et à nos besoins, libérer l’homme de ses limites et de sa pauvre condition pour le conduire vers la supériorité. Mais la recherche scientifique est essentiellement un outil au service du système, au service du pouvoir, destiné à l’entretenir et à le légitimer. L’idée d’une science neutre et absolue qui nous emmènerait vers l’inéluctable société du futur est un dogme. Les résultats ne sont que les fruits de recherches, dont les orientations dépendent de décisions économiques et politiques, souvent prises dans l’ignorance des conséquences concrètes de leurs mises en application. Outre les questions éthiques soulevées par exemple par la génétique, les enjeux économiques et politiques de la maîtrise d’une science sont trop peu souvent décodés.

Chaque époque a ses craintes et ses luttes, mais entre technophobie systématique et enthousiasme fanatique, entre alarmisme et inconscience, il y a lieu de s’interroger sur la manière dont se décide l’avenir de nos sociétés, qui semblent prêtes à beaucoup sacrifier au nom de la modernité. Le futur sera celui que l’on crée aujourd’hui. Or, c’est une société technofuturiste totalitaire au service du profit, guidée par la concurrence et la surconsommation, qui se dessine de plus en plus nettement. Le peuple, manipulable à souhait, est descendu au rang de cobaye sous contrôle. Libéré de la nature, il est réduit en esclave des technologies modernes, dont le mode de vie et les consommations sont rationalisés pour mieux rentrer dans les cadres de productions. Toutes et tous au service du progrès !

Les savoirs, les technologies et leurs conséquences, les modes de décisions et les orientations de la société doivent être remis en question. Au cours de quatre soirées thématiques composées de films et de rencontres/débats, nous aborderons sous différents angles la question des sciences en société. Le but de ces soirées est également de parler des moyens de lutte et de résistance, d’exemples de mobilisations et de réappropriations de savoirs et de techniques, de construction de réseaux citoyens. Un repas sera proposé chaque dimanche entre les séances, histoire de poursuivre la discussion en se rassasiant. D’autres séances réparties pendant ces 4 semaines permettront d’illustrer d’autres sujets et d’autres approches.

Cette programmation a été élaborée avec l’aide de la Fondation Sciences Citoyennes, organisatrice du festival "Les sciences en bobines" qui a lieu depuis trois ans au mois d’octobre à Paris et qui propose des films critiques et militants et des débats pour que le dialogue s’engage entre chercheurs et citoyens, pour favoriser la réappropriation citoyenne et démocratique de la science afin de la mettre au service du bien commun.

http://www.sciencescitoyennes.org



Alors que l’on nous somme d’ingurgiter des OGM, il est désormais interdit d’apprécier un fromage au lait cru. Notre pain quotidien est de plus en plus contrôlé, sécurisé, aseptisé tandis que dans le même temps notre alimentation se révèle chaque jour plus pathogène : gorgée de produits phytosanitaires, pauvre et déséquilibrée, stérile. Nous ne voulons plus nous soumettre aux normes sécuritaires, aux hygiénismes et autres pasteurismes mortifères qui provoquent crises sanitaires, allergies et autres maladies dites "de civilisations". De plus en plus de produits comestibles sont rejetés, artificiellement définis comme impropres à la consommation. Des quantités de plus en plus colossales d’aliments sont détruits ou jetés. Nous ne voulons pas nous résigner à ce gâchis. Lors de cette soirée, nous vous proposons d’entrer en résistance. Réapproprions-nous une part essentielle de notre existence : notre alimentation. Préparons ensemble un festin gargantuesque et régalons-nous de fromage au lait cru, d’aliments soi-disant périmés, de légumes délaissés, d’herbes dont on ne veut pas, de nourritures récupérées, etc. Ce soir, nous voulons manger et boire, partager et échanger nos savoirs et nos pratiques, nos expériences et nos envies. A table !

30.11 > 19:00


Jean Druon, 2005, FR, video, vo, 95

Notre société est-elle au bord de l’effondrement ? Comme un empire qui ne survit que par son extension et par l’exploitation à l’extrême de ses forces, notre « Babylone » a besoin de dépenser de plus en plus pour survivre, et doit sacrifier de plus en plus de l’autre côté, celui de l’homme, de son bien-être et de ses libertés. Les sacrifices à accepter ne peuvent que devenir de plus en plus oppressants, ils doivent être imposés par la persuasion/manipulation, par la menace, voire par la force. « Ce film, en examinant les conditions du développement des sociétés occidentales, entend moins recenser les grands dangers qui nous assaillent que de poursuivre la description de la condition de l’homme moderne. » Les problématiques abordées par le film dressent un panorama effrayant des menaces que la société technomarchande moderne se pose à elle-même... et à ceux qui la composent, pour le bien de concepts abstraits basés sur des statistiques économiques, la croissance, le progrès. L’inertie du système a fait ses preuves, mais jusqu’à quand « Babylone » tiendra-t-elle ? Inutile de dire que le film n’est pas très optimiste.

24.11 > 20:00 + 09.12 > 20:00


"La semence du progrès", (USA), 1983, VF
"La médecine des riches chez les pauvres", (Sénégal-Gabon), 1975, VF ST NL

L’excellente et trop rare série « Au nom du progrès » a été réalisée entre 1974 et 1983 par G. Troeller et M-C. Deffarge (avec la collaboration de l’économiste François Partant), partis explorer le « sous-développement » à travers le monde. Leur analyse est d’une pertinence et d’une richesse épatante, une leçon pour la douce condescendance empreinte de charité qui baigne le regard du premier monde sur le troisième. A travers une quinzaine de films, et autant de pays visités, ils dressent un portrait du modèle néo-colonialiste, le développement et le progrès vus par un Occident qui qualifie ce qu’il ne comprend pas de « primitif » et qui s’impose au monde entier, formant partout des élites locales pour porter les intérêts du système et entretenir la dépendance. Les mécanismes de la mondialisation, décodés un à un. Leur analyse est à chaque fois détaillée et extrêmement éloquente. « La semence du progrès », réalisé aux USA, montre l’absurdité de ce que l’on nomme progrès et l’aveuglement d’une société entière derrière un vocabulaire antinomique. Le premier monde est-il si développé que ça ? Où est le développement, où est la sauvagerie ? C’est malheureusement cette vision qui s’exporte, la colonisation mentale en œuvre. « La médecine des riches chez les pauvres » l’illustre parfaitement, montrant comment une société en arrive à se dévaloriser elle-même pour se conformer au « progrès », transformant au passage la santé en commerce, les malades en consommateurs et les guérisseurs traditionnels en charlatans.

25.11 > 20:00


Alex Grasshof, 1972, US, 16mm, vo, 42

Attention : vous êtes peut-être en danger, afin d’éviter des traumatismes irrémédiables, venez voir cette rareté sortie des caves d’un collectionneur fou ! "Le choc du futur", la confrontation prématurée de l’homme avec son avenir. Ou quand le rythme d’apparition de nouvelles technologies et de nouvelles connaissances dépasse sa capacité d’assimilation. Adaptation du livre à sensation du même nom écrit par Alvin Toffler en 1970 (qui popularisa le terme de "transhumanisme"), ce "documentaire" passe en revue les avancées sociales et scientifiques auxquelles risquent d’être confrontés les hommes de cette fin de XXe siècle (ou presque). Que deviendrons-nous quand les biotechnologies permettront de changer de couleur de peau comme de chemise, quand il y aura plus de mariages collectifs que de petits couples bien rangés, quand les poupées parleront...!? Autant de questions éthiques cruciales, une mise en garde improbable destinée à la société du jetable et de l’instant. Le film d’Alex Grasshof explore ces perspectives dramatiques dans un ton qui ne peut être qu’hilarant avec le recul ! Cette curiosité, en plus d’être drôle, est très impressionnante, avec son montage terrifiant, sa musique funky déglinguée, ses prédictions maladroites... et Orson Welles en narrateur, s’il vous plaît !

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Forward to the Past
Une compil’ maison des prédictions futuristes les plus improbables du cinéma...

25.11 > 22:00


Parties 1 & 2 : 02.12
Parties 3 & 4 : 09.12

Les 4 parties, et donc les 2 séances, peuvent être vues indépendamment

Pour aborder la thématique sous un angle un peu différent, nous vous proposons de suivre cette excellente série anglaise qui revient sur un siècle de manipulation de l’esprit humain, en 4 épisodes. Adam Curtis raconte de manière captivante comment les théories de la psychanalyse développées par Freud ont été utilisées tout au long du 20e siècle. Dès les années 1910, Edward Bernays, le neveu américain de Sigmund s’interroge sur les applications potentielles des théories de son oncle. Si Freud tentait de comprendre le subconscient de ses patients, Bernays ira plus loin en se disant que si l’esprit humain fonctionne réellement comme le pense Freud, il devrait être possible d’influencer ses sentiments et ses désirs. C’est le début d’une ère de marketing commercial et politique, la transformation de l’être humain en un pion à la poursuite d’un bonheur toujours plus éloigné. Les débuts aussi de la société de consommation de masse, une société au service de l’individu, dont il faut maintenir l’insatisfaction pour qu’il continue à consommer.

Dès les années 20, Bernays convainc les grandes entreprises américaines qu’elles peuvent faire désirer aux gens des biens dont ils n’ont pas forcément besoin, ce qui permet de les produire en masse. Pour cela, il utilisera toute une série de techniques encore utilisées aujourd’hui, de l’utilisation de célébrités pour vanter un produit à l’érotisation des campagnes publicitaires.
Le succès de ses campagnes l’amène à penser qu’il ne s’agit pas uniquement de vendre, mais de créer un sentiment de satisfaction qui rend les masses dociles, une application politique est également possible. Le deuxième épisode explique comment le nazisme a fait penser aux classes dirigeantes américaines que l’être humain cache des instincts barbares qu’il faut réprimer en l’enfermant dans un bonheur artificiel. Les démocraties de l’après-guerre seront donc basées sur cette vision d’individus à maintenir sous contrôle.

La 3e partie montre comment, dans les années 1960, l’idée que l’inconscient ne doit pas être réprimé mais libéré deviendra populaire. On encourage l’individu à s’exprimer et à s’épanouir, le bonheur est l’affaire de chacun. Les entreprises ne tarderont pas à voir du potentiel dans ces nouvelles idées qui créent de consommateurs voulant se démarquer à tout prix.

Dans la dernière partie, Curtis revient sur la manière dont les politiciens de gauche en Angleterre et aux USA se sont tournés vers ces techniques développées par le Business pour regagner en popularité. Mais en se moulant sur les sentiments et les désires des individus, la gauche devient un banal produit de consommation, avec son lot de campagnes de relations publiques et de marketings électoral et médiatique. Les politiciens croyaient ainsi créer une nouvelle forme de démocratie qui corresponde réellement aux sentiments de l’individu, mais oublièrent que les techniques qu’ils adoptaient étaient destinées, non pas à libérer le peuple, mais à l’enfermer dans ses désirs pour mieux le contrôler. Un documentaire éclairant !

02.12 > 22:00 + 09.12 > 22:00


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