Les hommes, fascinés par leur futur, rêvent souvent de modernité et de domination de la nature. Régulièrement, des mouvements ont voulu tirer un trait sur le passé et poser des bases pour un avenir qui ferait table rase des vieilles cultures, délivrer la société de ses traditions rétrogrades pour la tirer vers un avant salutaire. Les perspectives d’amélioration et de purification de l’humain, et du vivant en général, s’inscrivent dans cette vision. On pense par exemple au Futurisme italien, art urbain radical et philosophie de la vitesse, rêvant de dynamisme et de modernité, qui finit par se rapprocher du fascisme et accueillit les guerres comme des vagues d’énergie purifiante balayant le vieux monde. Aujourd’hui, ces perspectives refont surface sans tabou, avec le prétexte technologique qui les crédite d’une "neutralité" scientifique presque fataliste. Le transhumanisme en est la représentation la plus évidente. Par transhumanisme, on entend la phase précédant le posthumanisme, littéralement la disparition de l’humanité, l’avènement d’un surhomme délivré des contraintes de la nature et de ses limites physiques et mentales, les avancées biotechnologiques dessinant désormais ces possibilités. Héritiers libertariens de la cybernétique, les transhumanistes réduisent le vivant à de l’information, à un code ADN, que l’on peut mesurer, encoder, modifier ou encore envoyer dans l’espace. En dehors des "extropiens" auto-proclamés, beaucoup d’artistes se réclament du néo-Futurisme et embrassent avec fascination l’idée de modification du vivant et de l’humain. Or l’influence culturelle sur l’imaginaire collectif conduit à la popularisation de ses valeurs, sans vraiment les questionner. Et quand on sait que ces concepts sont défendus et vendus par les plus puissants intérêts économiques mondiaux dont le pouvoir politique n’est plus à prouver, il y a de quoi s’interroger sur cette fascination et ses impacts.